Dans cette édition du Réveil, nous vous proposons à nouveau une entrevue avec une personnalité de la région. L’idée est d’aller un peu plus loin sur ce que l’on connaît de cette personne. Cette semaine, l’économiste bien connu Marc-Urbain Proulx répond à nos questions.
Vous êtes natif de Jonquière. Après avoir complété un baccalauréat en études urbaines à l’UQAM, vous avez obtenu une maîtrise en géographie, économie et sciences politiques en fréquentant la célèbre London School of Economics and Political Sciences. Vous avez ensuite obtenu un doctorat de l’Université d’Aix-en-Provence à Marseille. Pourquoi êtes-vous revenu pour enseigner comme vous le faites depuis 35 ans à l’UQAC?
Je voulais revenir à Saguenay pour m’investir dans le développement régional. Et je me suis engagé dans la collectivité en publiant beaucoup d’articles scientifiques et des bouquins. J’organisais aussi des forums et des séminaires sur différents thèmes, comme la décentralisation, l’innovation, la gouvernance, la gestion des villes, les énergies renouvelables ou les autochtones. Ce sont tous des enjeux qu’on a dans la région. J’allais chercher des spécialistes de partout et je le faisais pour sensibiliser le milieu à comprendre ces enjeux.
Vous avez 67 ans et vous continuez d’enseigner à temps plein. Pourquoi?
Je pourrais prendre ma retraite et je serais confortable parce que j’ai un bon fonds de retraite. J’aime beaucoup le contact avec les jeunes. En plus des Québécois, on a notamment beaucoup étudiants de la France et d’Afrique. C’est peut-être de la prétention, mais j’ai l’impression d’être utile. Je n’enseigne plus de la même manière que durant mes premières années. J’étais débordé en début de carrière et je manquais de temps à leur consacrer. Dans mes cours, je pense que j’en ai plus maintenant. Je suis plus patient également et je vulgarise plus facilement les enjeux, avec des exemples concrets. J’avais un dicton quand j’étais étudiant. Je disais que les jeunes professeurs compliquent les choses simples et que les vieux simplifient des choses compliquées. J’espère être rendu un vieux professeur!
Il y a quelques années, on vous voyait beaucoup dans les médias. Vous avez entre autres critiqué Rio Tinto et le résultat des fusions municipales à Saguenay, mais vous êtes maintenant moins présent. Pourquoi?
J’aime mieux ne plus répondre aux demandes d’entrevue, parce que quand les journalistes me posent des questions, je réponds de façon directe. Je n’ai pas de faux-fuyants ni la langue de bois. Je les réfère à des collègues plus jeunes. J’ai fait ma part. Quelle que soit la réponse que l’on donne, il y a toujours des gens pas contents. Inévitablement, on a des reproches ou des gens nous regardent de travers. J’ai moins d’énergie qu’avant et c’est normal avec l’âge. Pour rester à l’université, j’ai dû élaguer certaines choses.
En terminant, pensez-vous qu’en 2023, les gens ont bien compris l’importance des enjeux du développement régional, de nos ressources naturelles notamment?
On a cheminé un peu, on fait attention, mais pas suffisamment. La valeur de nos ressources naturelles est beaucoup plus élevée que le marché, mais on écoute les groupes de pression et on suit les forces du marché. On serait mieux d’avoir une capacité de négocier avec les compagnies, plutôt que de se faire concurrence pour obtenir des faveurs. Nos décideurs sont débordés. Ils ont des enjeux quotidiens de gestion. Il nous manque de l’intelligence collective et on n’en aura jamais assez parce que des enjeux nouveaux arrivent constamment. On est dans un monde en turbulence qui évolue très rapidement.